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Sophie Cadieux en entrevue

Sophie Cadieux en entrevue

Crédit photo Lou Scamble

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La nouvelle production originale de Séries Plus nous plonge en plein cœur d’une tragédie, alors qu’un adolescent pose un geste inattendu et terrible… On a fait un brin de jasette avec la comédienne Sophie Cadieux afin d’en apprendre davantage sur son expérience au sein de la distribution de Bête noire!

Sophie, présentez-nous votre personnage de Bête noire.
Dans l’histoire de Bête noire, on suit le côté intime – et je dirais plus public – d’une enquête policière. Il y a le côté de la famille puis, à l’autre extrémité, mon personnage, la psychiatre coroner Éliane Sirois, et le sergent-détective Boisvert, qui tentent de faire sens d’un acte qui n’en n’a pas, de sens… Cependant, comme Éliane vient de la psychiatrie, elle redoute un peu de tourner les coins ronds. C’est ce que je trouvais beau, de ce personnage. Elle fait partie d’une enquête, mais elle est pas mal certaine qu’il n’y a pas qu’une cause. Elle est beaucoup «dans le regard»; elle scrute les autres êtres humains. Elle est ancrée dans l’empathie et connectée à la douleur des gens autour d’elle.

À ce stade-ci de votre carrière, quel défi représentait ce rôle pour vous?
Ce qui m’a le plus émue, c’est le fait que personne n’est à l’abri d’une telle tragédie, une fusillade dans une école… À chaque jour de tournage, on se répétait que c’était inconcevable. On peut lire sur le sujet, mais le sentiment qui s’empare de ces personnes qui sont confrontées à ça, c’est incommensurable, c’est plus grand que nature. C’est la tragédie dans le sens le plus pur. On avait de longues discussions entre comédiens, à se demander ce que nous, nous ferions. Parfois, on en venait à excuser des choses qui, sur papier, sont impardonnables, parce que ça peut être profondément humain.

Comment se prépare-t-on à un tel rôle?
J’ai rencontré une coroner-psychiatre, j’ai lu beaucoup sur ce métier aussi. Par exemple, il y en a une au Québec qui a été en charge de l’affaire Magnotta et d’autres cas qui ont fait les manchettes. Cependant, à partir du moment où on a été en tournage, je me suis vraiment laissée guider par la réalisatrice, Sophie Deraspe. Par l’intelligence du texte aussi, car c’est ce qui est intéressant : le texte montre toutes sortes de failles de mon personnage et la volonté de cette femme, qui veut tellement protéger la famille, notamment la mère, qu’elle en vient à dépasser un peu son cadre professionnel. Sophie Deraspe me disait d’être très humble devant la douleur des gens.

Pourquoi est-ce important d’aborder un sujet aussi difficile à la télé dans la période actuelle?
Je pense que c’est la façon dont le sujet est traité… On traite souvent de cas extrêmes et de violence, mais je crois que la série Bête noire offre une autopsie de tout l’écosystème. Elle permet de voir comment l’acte d’une personne a des répercussions sur plein de gens autour, comment la douleur nous fait réagir, et nous amène à constater que ça prend du temps, du discernement, de l’empathie et de l’ouverture pour passer au-delà de quelque chose comme ça. C’est de montrer que malgré la douleur, il y a quelque chose qui va se reconstruire. Quelque chose qui meurt, aussi, mais il est possible de réapprendre à vivre, dans toute cette résilience.

Avec un sujet aussi difficile et le tournage en pleine pandémie, comment était l’ambiance sur le plateau de tournage?
Il y a toujours une effervescence sur un plateau de tournage, une camaraderie et beaucoup de blagues! Mais là, on était un peu reclus avec nos masques et nos visières, assis isolés les uns des autres. Dans le fond, ça représentait un peu l’esprit de la série. Il y avait beaucoup de calme… Une bonne entente aussi, mais ce calme-là qu’appelait la série et qui a été bonifié par le fait qu’on était isolés dans nos attirails de sécurité!

Un moment marquant ou touchant du tournage pour vous?
Ouf, il y en a eu plusieurs… Ces moments que j’ai partagés avec Isabelle Blais, qui interprète la mère de l’adolescent responsable de la fusillade. Il pouvait y avoir une foule de personnes autour de nous, mais on se plongeait dans les yeux l’une de l’autre. Sinon, les scènes à l’école, avec les jeunes. Des fois, on oublie qu’on vieillit; dans ma tête, j’ai encore un peu 26 ans! En travaillant sur la série, je me préparais et je me disais que j’allais côtoyer des ados dans cette tragédie. Mais quand on a fait la grosse scène de tournage où tous les jeunes sont évacués de l’école, j’ai eu un choc. J’ai réalisé qu’ils étaient des enfants. Le fait d’engendrer cette violence, et c’est tellement un être petit et en définition… On dirait que cela a creusé l’écart entre nous. Ce n’était plus quelqu’un qui, dans ma tête, avait 10 ans de différence avec moi, c’était un enfant. Je sais, les ados ne veulent jamais qu’on dise qu’ils sont des enfants! (rires) Mais la femme que je suis devenue, la mère que je suis n’en revenait pas que des enfants puissent être confrontés à une telle chose.

Petite question bonus, en terminant : durant la pandémie et le confinement, avez-vous développé un nouveau talent ou une nouvelle passion?
Je fais trois repas par jour, ce que je n’avais pas fait depuis longtemps! (rires) J’ai découvert que j’ai une petite Marilou (3 fois par jour) intérieure. J’ai fait des barres tendres! (rires) On a rénové notre maison aussi. J’ai appris à défoncer des murs et à mettre de la laine isolante. Tout ça a pas mal occupé mon été, avant de commencer le tournage de Bête noire!